Révision des contrats 2006 – 2010 : le gouvernement tente de s’expliquer
L’amendement au Projet de loi de finances pour 2021, déposé par le gouvernement et qui ouvre la voie, pour les centrales photovoltaïques d’une puissance supérieure à 250 kWc, à la renégociation des contrats d’achat conclus entre 2006 et 2011, a été adopté par l’Assemblée nationale à 91 voix contre 32. Le gouvernement publie un communiqué pour s’en expliquer publiquement.
« Depuis le début des années 2000, l’Etat soutient le développement des énergies renouvelables par l’intermédiaire de tarifs d’achats garantis aux producteurs. Le gouvernement prévoit de revoir, parmi ces contrats, ceux qui bénéficient d’une rémunération manifestement excessive par rapport à l’investissement réalisé, pesant exagérément sur les comptes publics, pour la ramener à une rentabilité plus raisonnable », explique dans un communiqué le ministère de la transition écologique. Ces ajustements concerneront un nombre réduit de contrats parmi les plus gros signés entre 2006 et 2010. Au total, ce sont quelques centaines de contrats sur le total des 235 000 contrats photovoltaïques signés qui seront concernés. « Il s’agit de revenir sur une petite minorité de contrats, on parle de 800 contrats sur les 235 000 qui existent, et qui concernent des installations déjà amorties, qui ont bénéficié d’un rendement du capital parfois supérieur à 20% aux frais du contribuable », a déclaré Barbara Pompili, ministre de la transition écologique, à l’Assemblée nationale.
Une clause d’examen au cas par cas est prévue pour étudier chaque situation individuelle et ajuster le dispositif selon la situation économique des projets au plus juste. Grâce aux économies réalisées, de nouveaux projets de production d’énergie renouvelable pourront bénéficier d’un soutien pour accompagner leur développement, poursuit le ministère.
Les tarifs d’achats garantis aux producteurs sont déterminés pour permettre une rémunération à la fois raisonnable et suffisante des investisseurs. Afin de soutenir le décollage de la filière photovoltaïque en 2006, l’Etat a adopté un tarif de soutien au photovoltaïque dix fois supérieur au prix de marché (de l’ordre de 600 €/MWh), garanti sur une durée de 20 ans (tarif déterminé au regard des coûts d’investissement de l’époque). Entre 2006 et 2010, ces coûts ont été divisés par quatre pour les centrales au sol ou les grandes toitures, sans que le tarif ne soit suffisamment réévalué : cette situation a conduit à l’explosion de la rentabilité des projets, explique le gouvernement pour justifier sa décision.
Dès 2010, les professionnels convenaient que certains segments de marché bénéficiaient d’une rentabilité excessive avec un « taux de rendement interne supérieur à 20% », correspondant à une rentabilité des fonds propres pour l’actionnaire pouvant atteindre 80%. La modification du tarif en 2010 a mis fin à cette situation anormale, mais n’a eu aucun effet rétroactif sur les projets qui avaient signé des contrats d’achat entre 2006 et 2010 : il existe aujourd’hui environ 235 000 contrats qui bénéficient de ces tarifs particulièrement avantageux.
Un cumul de 20 milliards d’euros qui resterait à verser
Ce « stock » d’anciens contrats (puissance installée de 3,6 GW) représente moins de 1% de la production d’électricité nationale (5% de la production d’électricité renouvelable), mais concentre le tiers du soutien public aux énergies renouvelables, soit près de 2 milliards d’euros par an, pendant encore une dizaine d’années, soit un cumul de 20 milliards d’euros qui reste à verser.
Pour corriger cette situation, le gouvernement va engager une révision rétroactive ciblée des tarifs sur les plus gros contrats photovoltaïques signés entre 2006 et 2010. Toutes les installations petites et moyennes de moins de 250 kWc ne seront pas concernées : ce seuil exclut donc toutes les installations des particuliers (moins de 9 kWc), ainsi que la quasi-totalité des installations agricoles qui sont en dessous de ce seuil et qui ne seront donc pas impactées. Avec cette renégociation, les économies attendues s’élèveraient à 400 millions d’euros par an, soit 4 milliards sur la période de dix ans.
Le gouvernement souligne que :
• Le tarif de soutien de ces installations sera revu à la baisse ;
• Aucun remboursement des aides déjà perçues ne sera exigé ;
• Un traitement particulier des zones non interconnectées (ZNI) sera effectué ;
• Les exploitants et leurs financeurs devront probablement revoir leurs plans de financement.
Le gouvernement déclare qu’après concertation avec la filière [NDLR : ce qu’elle nie – voir article suivant], il a également intégré une clause de sauvegarde et d’examen au « cas par cas » : il s’agit de couvrir les situations dans lesquelles la réduction du tarif serait de nature à compromettre la poursuite de la production. Dans ce cas, des aménagements pourront être consentis pour éviter ce risque, après analyse contradictoire par la Commission de régulation de l’énergie (CRE). En particulier, les contrats d’achat pourront être allongés dans ce cadre.
Le gouvernement tient à souligner que cet ajustement portant sur quelques centaines de contrats à la rentabilité hors norme ne marque en aucune façon une volonté plus générale de revenir sur ses autres engagements relatifs aux énergies renouvelables, qui sont massifs : plus de 110 milliards d’euros d’engagements à couvrir sur les 20 ans à venir.
« Cette mesure rectifiant une anomalie manifeste n’a donc aucune raison d’avoir le moindre impact sur le financement des projets d’énergies renouvelables. Tous les nouveaux dispositifs de soutien ont été notifiés auprès de la Commission européenne, ce qui signifie que le niveau de rémunération a fait l’objet d’une validation formelle au niveau communautaire. Les nouveaux projets d’énergies renouvelables s’appuient donc sur des contrats d’achat juridiquement solides, qui ne peuvent être remis en cause », assure le ministère.
Entre 2020 et 2021, le gouvernement a prévu d’accroitre le soutien aux énergies renouvelables de près de 25%. De nouveaux appels d’offres seront également lancés et permettront de financer plus de 10 GW d’installations solaires photovoltaïque au cours des 5 prochaines années.
Concernant plus spécifiquement la filière photovoltaïque, plusieurs mesures particulièrement favorables à la filière ont été annoncées ces dernières semaines, avec notamment l’introduction d’un nouveau guichet tarifaire permettant de soutenir des installations sur toiture allant jusqu’à 500 kW de puissance, au lieu de 100 kW jusqu’ici. Les économies générées par la disposition portée par le gouvernement sur les anciens contrats solaires photovoltaïques à la rémunération excessive permettront d’accompagner ce déploiement accéléré des énergies renouvelables dans notre pays, promet le ministère de la transition écologique.
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